Formidable duo de poètes dans l’un des parcs de la capitale française, les « Buttes-Chaumont », sous le joli prétexte « Poésie is not dead » ce dimanche 28 juin 2015.
À 20h34, le soleil du couchant éclaire de face les deux protagonistes. Séparément chacun vaut le détour. On se souvient d’un Pennequin à Lectoure, une découverte magnifique. Quant à Lavant, il lui arrive d’en faire trop mais souvent c’est le saisissement comme au festival du Goût, au Havre en 2014, lorsqu’il lut Céline.
Aux Buttes-Chaumont ces deux-là sont faits pour s’entendre. Oui S’EN-TEN-DRE… Bien que leurs grains de voix soient fort différents, les percutions étudiées de leurs paroles s’accordent à merveille. Pennequin (à droite sur la photo) est porté par sa haute stature de déménageur de mots, Lavant (au milieu cherchant ses textes) par une belle raucité qui est aussi une dévoration de la langue.
Quand « La ville est un trou », répète le poète Charles Hennequin, « Ma souffrance plantée en geste de cyprès » lui répond le comédien Denis Lavant qui puise dans son anthologie personnelle.
« On est on top ici et même plus loin… Mais au-delà du top on peut tomber sur un bec » enchaîne Pennequin. On glane de-ci de-là de quoi remplir sa besace et son contentement. Des jus de gingembre très corsés ou de bissap plus accommodants sont servis alentour. Alors on mélange un peu tout, en glissant tranquille, on prend tout goulûment :
« Nous sommes des chiens… entonne Lavant… On lui fabrique un conscience de chien … La somme de nos possibilités nous étouffe. » On ne nous dit pas qui est l’auteur mais on endosse facile le personnage de spectateur privilégié pour ce petit bonheur partagé.
Pennequin se taille un triomphe modeste avec son Martien-qui-veut-détruire-la Terre-et-qui-téléphone-à-sa-maman.
Et Lavant impose sa lecture quand des mouflets sur la fin de ce dimanche ensoleillé se battent à coup de bouteilles d’eau rafraîchissante (ils ne savent pas ce qu’il ratent) : « Le fruit de la beauté du monde n’est pas comestible… » Plus tard, on trouvera cet écho sur le Net, avec ce mot d’égrégore qui enchante l’oreille et l’esprit… Aux Buttes-Chaumont, on quitte notre aréopage de poètes savamment déjantés avec Lavant lisant : « Une calamité s’est installée, elle est venue dont on ne sait où. »
La poésie a de ces justesses qui vous prennent tout entier.
« Poésie is not dead est un concept et un collectif polymorphe et protéiforme qui se veut être un rhizome entre la poésie contemporaine et les autres arts. », nous apprend Wikipédia.