[Lors des préparatifs d’un voyage, je tombe sur… Nagori, le beau petit livre de Ryoko Sekiguchi (2018), 名残り (nagori) : « La nostalgie de la saison qui vient de nous quitter », lecture recommandée, qui m’inspire ce haïku, entre deux saisons]
Pourquoi pas un haïku plurilingue ?
Un haïku de fin d’été, en français, japonais, arabe, avec un zeste d’anglais. Un cocktail de langues pour Yara, 3 mois.

Été finissant
petit crachin temps chagrin
Love and Happiness
夏終わる
霧雨悲しむ
ラブとハピネス
نهاية الصيف
القليل من رذاذ الحزن
الحب والسعادة
Ce moment-haïku a été écrit d’abord en français, une langue qui expose ici ses consonnes sifflantes et chuintantes.
Puis en japonais, pour le mystère de la langue. Fascinant que ces trois lignes contiennent, comme pour tout texte en japonais contemporain, trois systèmes d’écriture : kanjis, hiraganas et katakanas. Chacun est facile à reconnaître : les kanjis sont les caractères chinois de l’écriture japonaise ; les hiraganas sont un syllabaire constitués de « kanas lisses », comme à la fin des deux premières lignes du haïku ; les katakanas servent à écrire les mots d’origine étrangère, comme dans la troisième ligne du haïku.
Enfin, une version arabe, avec un alphabet qui s’écrit de droite à gauche, donne à entendre une profusion de a, un qaf guttural et des z zézayants.
Lecture de la version japonaise :
[natsu owaru
kirisame kanashimu
rabu to hapinesu]
Lecture de la version arabe :
[nihayat el-saïf
el-qalīl min razāz el-hazin
el-hub w el-sa’adat]
« Love and Happiness » est le titre d’une chanson interprétée par Al Green, en 1973.
Détails sur ce titre célèbre : https://en.wikipedia.org/wiki/Love_and_Happiness
Dans un registre similaire, la contradiction apparente d’une météo capricieuse et d’une joie intérieure apparaît chez Bashô, ainsi formulée :
霧しぐれ
富士を見ぬ日ぞ
面白き
Brume et pluie
Fuji caché. Mais cependant je vais
Content.
Le Musée Guimet l’a publié le 9/09/2019 sur Twitter en l’accompagnant de la vue de Shono d’Hiroshige :

