richesse barbare

Rasbehari était très orgueilleux, et il en imposait. Il était très conscient du respect qui lui était dû et s’offensait d’une peccadille. Il fallait demeurer sur ses gardes quand on avait affaire à lui. Ses fermiers avaient toujours peur que leur patron ne s’estime insulté.

Sa maison me montra de façon éclatante ce qu’était l’abondance sans raffinement : abondance de lait, de blé, de maïs, de sucre candi de Bikaner, de gourdins et de bâtons, et aussi de respect. Mais pour en faire quoi ? Chez lui, il n’y avait pas un seul tableau, pas un seul bon livre, ne parlons pas de fauteuils confortables, ni de divan recouvert de beaux tapis et de coussins. Les murs étaient tachés de chaux et de crachats de bétel ; derrière la maison passait un égout plein d’eau sale et d’ordures. L’architecture de la demeure était affreuse. Les enfants ne faisaient pas d’études, leurs vêtements et leurs chaussures étaient grossiers et malpropres. L’année précédente, la variole avait tué en un mois près d’une demi-douzaine d’enfants de la maisonnée. À quoi avait servi cette richesse barbare ? Qui a profité des exactions à l’égard des fermiers gangotas, et des biens ainsi amassés ? Certes, le prestige de Rasbehari Singh ne cessait d’augmenter.

Bibhouti Bhoushan Banerji, De la forêt, éditions Zulma, mars 2020, roman traduit du bengali (Inde) par France Bhattacharya.

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