Prix roman FTV 2019, Ali Zamir, complètement dérangé

Le Prix Roman France Télévisions 2019 récompense Ali Zamir, pour son livre Dérangé que je suis (Le Tripode).

Dans la catégorie Essai, Valérie Zénatti a été récompensée pour Dans le faisceau des vivants (L’Olivier).

Dérangé que je suis l’a emporté au premier tour de scrutin avec neuf voix, comme le raconte Laurence Houot, pour Culturebox, témoignages de jurés lecteurs télespectateurs à l’appui. Des jurés visiblement émus par leur lecture…

Ali Zamir, a été l’invité du journal du soir de France Ô, à 18h, et de La Grande Librairie.

Une visite chez Zamir…

Visiter Ali Zamir en sa chacunière de Montpellier est une chance qu’on savoure comme les samboussas que sa dame nous a préparés. Car Zamir est hospitalier comme ses romans sont accueillants avec le lecteur.

Chez lui, en images, c’est sur Culturebox

C’est une histoire de dockers aux Comores, sur l’île d’Anjouan. Une course poursuite aux Îles de la lune, qui oppose un trio de trois caïds nommés Pirate, Pistolet et Pitié en concurrence à un docker surnommé « Dérangé », d’où le titre du troisième roman d’Ali Zamir, « Dérangé que je suis ». Un petit roman, petit comme une grosse nouvelle et c’est une bonne nouvelle tant le plaisir de lecture est grand.

Et comme on est en Afrique, les chariots des dockers sont baptisés de noms de sprinters américains. Ainsi poussés de gloire, ils vont plus vite.

Des mots à l’ancienne, qui vont vite…

Oui, le carburant de cette course poursuite de chariots de dockers est une écriture, un style à la Pagnol nous dit son éditeur, Le Tripode. Pagnol moins connu pour sa vitesse que pour une atmosphère. Ce qui est vrai : la lecture va très vite grâce à une langue française qui vous laisse coi, vous accoise, écrit Zamir qui aime les mots rares à l’ancienne mais évite tout néologisme (voir infra, comme on dit en littérature grise).

On traverse Mutsamudu comme un TGV, de la place Mzingajou jusqu’à la plage Foumboukouni dans la joie et la jactance d’un jeu fardé de mots vieux mais joyeux comme une friandise. Ça vous fait rire tel un cercueil ouvert, enivré par le récit de Dérangé opposé à ces tardigrades, dixit Zamir, c’est-à-dire ces pieds nickelés des docks du port international Ahmed-Abdallah-Abderemane qui semblent juste là pour faire briller Dérangé, personnage tendre et humble comme un gueux philosophe, à l’intelligence affûtée.

Ô lecteur oisif, ébahi par l’usage d’une langue française revigorée, revivifiée, ravigotée, requinquée, la lecture vous fera rire comme un peigne, rire comme un cercueil ouvert ou pleurer comme un veau, selon les mots de Zamir, tant son héros plutôt anti-héros déclenche une méchante hilarité enivrante avant d’être broyé de noir…

Quelle jactance que le lexique d’Ali Zamir dans Dérangé que je suis !

Le minuscule bureau d’Ali Zamir est peuplé de dictionnaires. Des vieux reliés comme un Robert en plusieurs volumes, des contemporains comme sa collection de Larousse spécialisés… Il assure ne pas forger de néologismes et préfère ostensiblement l’usage du mot ancien. Ses carnets en regorgent. C’est un collectionneur de mots à nul autre pareil.

Il y a puisé quelques pépites pour son écriture de Dérangé que je suis, dont certaines sont rêtives au correcteur automatique :

Chétive venelle

Jactance

Impéritie

Hâblerie excessive

Odeur thalassique

Elle me solaciait

Sa maman rébéqua

Afin de pouvoir accoiser

Ce pauvre petit enfant

Chablé

Gueuserie

C’est un parfait tartigrade 

Une fillette gourmandée

Quinaud

Réduit à quia

J’ai vu Pirate accoiser Pistolet d’un geste de la main

Avancer, se radiner, s’écarter avec accortise

Une femme adonisée

Chiromancienne

Blaser la curiosité

Blaser la soif

D’un ton moqueur comme pour m’angarier

Chacunière

Abuter

Et si elle concoctait un vénéfice à mon égard

(Vénéfice : empoisonnement par sorcellerie)

Peau ansérine

Chapechuter

Recevoir une giroflée à cinq feuillets

Se lever d’ahan

Banane fardée

Farder son jeu

Empyrée

Quinquets bien allumés

L’huis

Donner le dos

Amphitryonne

Délabirynther

Respiration singultueuse

Saisi de harassement jusqu’aux entrailles

Soudaine et cuisante cohibition (empêchement d’agir)

Tentatives de constupration 

Sinciput (≠ occiput)

L’obole d’un mot

LIENS :

Anguille sous roche, son premier roman adapté au théâtre : Papalagui, 6/01/19

La naissance étonnante d’Anguille sous roche et de son auteur : Papalagui, 16/08/16

Compte FB : Ali Zamir et ses lecteurs

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