Mia Couto (Mozambique), Prix Neustadt 2013

Le Mozambique est un pays de malheurs, dont le dernier en date est la rupture d’un cessez-le-feu de 21 ans, et le Mozambique est un pays dont l’un des fils est l’un des plus grands écrivains du continent africain. Mia Couto, né à Maputo en 1955, vient de remporter le Prix Neustadt, surnommé le « Nobel américain », récompense littéraire dotée de 50 000 dollars (37 000 €) par l’Université d’Oklahoma, la famille Neustadt et la revue littéraire World Literature Today (WLT).

Ce prix bisannuel, destiné à consacrer tant des romanciers, des poètes que des dramaturges, est décerné à un auteur traduit en une vingtaine de langues, déjà lauréat du Prix Camões en 2013, le plus important prix littéraire du monde lusophone.

« Mia Couto essaie de soulever le joug colonial d’une culture en revivifiant sa langue« , a commenté le directeur exécutif de WLT, Robert Con Davis-Undiano.

Gabriella Ghermandi, qui a sélectionné Mia Couto pour le Prix a écrit quant à elle : « Certains critiques ont appelé Mia Couto « auteur de contrebande », une sorte de Robin des Bois des mots qui vole des sens pour les rendre disponibles dans chaque langue, en forçant des mondes apparemment séparés pour communiquer. Dans ses romans, chaque ligne ressemble à un petit poème. »

« Ce prix tombe à pic, car le Mozambique approche d’une période difficile. Pour moi personnellement, ce prix est bien sûr un rayon de soleil, en ce moment national triste », a réagi Mia Couto.

[« La Renamo, groupe armé reconverti en parti d’opposition, a mis fin à un cessez-le-feu de 21 ans pour réclamer notamment, une meilleure redistribution des richesses. Samedi, un bus a été attaqué faisant un mort et une dizaine de blessés. La peur de retomber dans la guerre civile a envahi le pays », selon Courrier international.]

Parmi les anciens lauréats du Prix Neustadt, figurent Gabriel Garcia Marquez (Colombie, 1972), le poète français Francis Ponge (1974), Octavio Paz (Mexique, 1982), Tomas Tranströmer (Suède, 1990), Edward K. Brathwaite (Barbade, 1994), Assia Djebar (Algérie/France, 1996), Nuruddin Farah (Somalie, 1998), David Malouf (Australie, 2000), Patricia Grace (Nouvelle-Zélande, 2008).

Extrait p. 76 du recueil de nouvelles Le fil des missangas [perles de verre] (2010, éd. Chandeigne, traduction Élisabeth Monteiro Rodrigues) :

« La vie est un collier. Je donne le fil, les femmes donnent les missangas. Elles sont toujours nombreuses, les missangas.

À chaque fois qu’il faisait l’amour avec l’une d’elles, il ne rentrait pas directement chez lui. Il allait, oui, chez sa vieille mère. À elle, il lui racontait les intimités de chaque nouvelle liaison, les différentes douceurs de chacune de ses maîtresses. Les yeux fermés, la vieille écoutait et faisait même semblant de s’endormir sur le canapé fatigué de la salle à manger. À la fin, elle prenait les mains de son fils dans les siennes et lui ordonnait de prendre un bain là même.

— Que ta femme n’aille pas sentir la présence d’une autre, disait-elle.

Et JMC se plongeait dans la baignoire pendant que sa vieille mère le frottait avec une éponge parfumée. Le bain terminé, elle le séchait, lente comme si le temps passait par ses mains et qu’elle le retenait dans les plis de la serviette.

— Continue, mon fils, distribue ton cœur qui est si grand. Ne cessa jamais de visiter les femmes. Ne cesse jamais de les aimer… »

 

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