Goncourt 2011 : le Jenni de L’Ordre et la Morale

L’Art français de la guerre est un gros roman écrit en cinq ans par un « écrivain du dimanche » [belle modestie !] qui a envoyé son manuscrit par la poste aux éditions Gallimard. Son blog de dessinateur nous parle de ses « Voyages pas très loin ».

Son livre est pourtant très ambitieux et très documenté, déployant la vie d’un ancien combattant et de ses guerres coloniales qu’il raconte à un homme jeune à l’avenir incertain. Comment transmettre ce passé qui ne passe pas ? Comment décoder ce qui se passe dans une banlieue de Lyon, alors que « l’émeute s’annonce », que des militants extrémistes nostalgiques de la guerre et de la force profitent de la misère sociale ?

L’Art français de la guerre décrit le génie français au sens ironique de la « guerre à la française ». Un art de la manipulation selon Jenni, une manipulation de la langue française aussi, celle qui classe les gens malgré eux, en conformes et non-conformes. Une aliénation qui parle de nous aujourd’hui, de notre destin commun après les guerres coloniales, en Indochine, en Algérie… voire dans les banlieues.

À lire avec profit le travail de Fluctuat.net, pour un bel entretien et un visionnage par Alexis Jenni du film L’Ordre et la Morale [signalé par Alexandre Le Quéré]. Le lauréat du Goncourt affirme [décidément modeste] : « On m’a souvent demandé ce qu’était L’Art français de la guerre, et je ne sais pas bien répondre. J’ai tourné autour pendant 600 pages et je ne sais pas le dire en quelques mots. Mais maintenant, je sais ce que je vais dire : « L’Art français de la guerre ? Regardez L’Ordre et la Morale, regardez le film de Mathieu Kassovitz. Tout est là, tout est montré ; c’est exactement ça, l’art français de la guerre, cette façon grandiose et absurde d’aller au massacre. J’en parle, il le montre ; regardez. »

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