Lussas (7/11), échos du monde haïtien

L’oublie tue deux fois est un film documentaire de Pierre Michel Jean (deux prénoms « sans trait d’union » suivi du nom de famille) sur le massacre d’Haïtiens en 1937, une épuration ethnique des travailleurs haïtiens sur ordre de Rafael Trujillo, dictateur à la tête de la République Dominicaine (1891-1961). Il a été sélectionné par Docmonde.

Ce massacre connu sous le nom de « massacre de Persil » fit entre 9 000 et 30 000 morts. (source : Encyclopædia Britannica)

« Les soldats dominicains avaient un brin de persil qu’ils présentaient aux suspects, ces derniers devant dire en espagnol que c’était du « persil » (en espagnol : perejil). C’était un véritable schibboleth, difficilement prononçable pour tout Haïtien, en raison de la présence de la lettre R et du son guttural de la J en espagnol dans le mot persil ou perejil (Wikipédia)

Nous l’avions évoqué dans Papalagui (03/10/2007) : « « Persil », le mot qui tue… »

Dans le documentaire L’oubli tue deux fois, un survivant, Henri Noncent livre un témoignage sensible (il avait sept ans à l’époque du drame ; il est aujourd’hui décédé ; le film lui est dédié). C’est le principal atout du film. Il s’exprime dans cet extrait, en créole, sous-titré en espagnol :

Une compagnie de théâtre haïtienne accueille deux comédiens dominicains. Un récit sur les faits eux-mêmes est présenté sur des cartons ou par la voix off de Pierre Michel Jean, chaude et profonde. Le film imbrique ainsi plusieurs dispositifs au détriment de la fluidité, comme s’il péchait par un excès de formes.

On peut néanmoins saluer cette entreprise tant l’art semble la moindre des préoccupations des Haïtiens de 2025, confrontés qu’ils sont aux gangs qui les rackettent à la sortie de l’aéroport ou sur les grands axes routiers, entre la capitale, Port-au-Prince et les Gonaïves au Nord ou les Cayes au Sud.

« Pour venir à Lussas, je suis passé par la République Dominicaine, raconte Pierre Michel Jean. C’est un film historique pour aujourd’hui, traversé par ces questions : quelle mémoire pour aujourd’hui ? quel récit porter sur un drame historique ? » 

Retenons la belle ambition d’essayer de transmettre à une jeunesse en demande de récits une part de l’histoire haïtiano-dominicaine lié à l’ancien dictateur Trujillo. 

« Je ne souhaite pas que le pays me dicte une conduite. J’accompagne mon film à l’étranger, au Canada, en France, au Burkina Faso. Notre histoire, on la connaît mal. Moi-même je n’ai appris cette histoire des massacres (entre Haitiens et Dominicains, en 1937) que lorsque j’étais à l’université. »

Prochaine diffusion du film en France, à Bagnolet, au Cin’Hoche, le 23 septembre 2025, en présence du réalisateur Pierre Michel Jean.

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