
Pour certains — ce n’est pas une loi.
À l’heure où le sommeil
est juste, quasiment sacré,
certains ne dorment pas.
Ils scrutent — et dans le plus
secret des pétales, ce n’est pas toi !
Pour certains — ce n’est pas un code :
à l’heure où toutes les lèvres
ont la sécheresse des dernières discordes —
certains ne boivent pas :
ils s’absorbent — le poing
fermé — dans les sables !
Pour certains, sans grimaces —
la vie est chèrement donnée.
Écrit à Berlin le 25 juin 1922 par Marina Tsvétaïéva (1892 – 1941) et publié dans Insomnie et autres poèmes, édition de Zéno Bianu, Gallimard, NRF poésie, 2015.
Marina Tsvétaïéva met fin à ses jours (par pendaison), à l’âge de 49 ans, le 31 août 1941 à Elabouga, en Tatarie.
… car même dans le dernier hoquet je resterai poète (décembre 1920)
Je sais tout ce qui fut, tout ce qui sera,
Je connais ce mystère sourd-muet
Que dans la langue menteuse et noire
Des humains — on appelle la vie.
[Le ciel brûle, 1913]
Ma dernière cendre sera plus chaude que leurs vies
[Vivre dans le feu, Confessions]
Légère est ma démarche,
– Ma conscience est légère –
Légère est ma démarche,
Ma chanson est sonore –
Dieu m’a mise seule,
Au milieu du monde ;
– Tu n’est point femme mais oiseau,
Alors – vole et chante.
[Le ciel brûle]
Je sais qui je suis : Une danseuse de l’âme.
[Vivre dans le feu, Confessions]
A lire, le beau livre que lui a consacré Vénus Khoury-Ghata : Marina Tsvétaïéva, mourir à Elabouga, Mercure de France