Pour éviter une polémique bizarre (politicienne, idéologique, populiste) sur l’enseignement de l’arabe en France, comment départager une ministre de l’éducation nationale qui a évoqué l’enseignement de l’arabe et du portugais dans les classes primaires (voir le JDD du jour) et une députée d’un bord politique opposé qui y voit – pour ce qui concerne la seule langue arabe – le risque de « renforcer » le communautarisme ? Elle l’écrit sur son site ou sur le site de son parti (nom de code LR), dans une interview au site Boulevard Voltaire, proche d’un actuel maire de Béziers.
Une fausse polémique aux relents très idéologiques prompte à déclencher des flux d’indignations, telle celle de Pierre-Louis Reymond dans La Croix du 02/06/16 : « La langue arabe, langue « communautaire », un contresens lourd de conséquences… ».
Bref, pour éviter l’indigestion d’un gloubi-boulga étouffe-chrétien, on pourrait rappeler à la députée de l’opposition de droite les propos d’un confrère député, Jean-François Copé, alors président du groupe les Républicains à l’Assemblée (alors UMP) quand en septembre 2009 (Slate, 11/09/09), il se déclarait : « favorable à l’enseignement de l’arabe dans le Secondaire » en précisant justement : « L’arabe est ainsi peu à peu assimilé à une langue essentiellement identitaire ou religieuse dont l’apprentissage serait un réflexe communautariste [sic]. Pourtant, (…) il est légitime pour des parents de souhaiter que leurs enfants apprennent la langue d’origine de leur famille.»
Jean-François Copé vient donc – involontairement – à la rescousse de Najat Vallaud-Belkacem, actuelle ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche dont les propos ne concernent cependant que l’intégration de langues jusqu’alors à statut spécifique (pour maintenir le lien culturel des enfants avec les pays d’origine de leurs parents immigrés) au tronc commun de l’enseignement primaire. Il ne s’agit pas encore de l’enseignement secondaire ou supérieur où l’enseignement de l’arabe est notoirement insuffisant comme le soulignent des tribunes d’universitaires : « La France doit redécouvrir la langue arabe » (Orient XXI, 07/01/15) ou des enquêtes journalistiques : « L’arabe au ban de l’école » (Le Monde, 18/06/15).
Pour départager la ministre et la députée, rappelons la sagesse d’un lettré musulman du IXe siècle né dans l’Irak des Abbassides, Ibn-Qutayba, fervent partisan de la circulation des langues et des savoirs lorsqu’il déclarait en faveur de la transmission des connaissances : « زَكَاةُ العِلْمِ نَشْرُهُ » autrement écrit : « zakātu l ‘ilmi nachruhu », autrement dit : « Il faut savoir payer l’impôt de son savoir ». (Blog J’apprends l’arabe, 19/08/11).