À 19 ans une passeuse répondant au prénom de Fatima traînait une valise rose à roulettes assez grande pour transporter du Maroc à l’Espagne via la ville frontière de Ceuta ce qu’elle devait remettre à un Ivoirien résidant dans l’archipel espagnol des Canaries et clairement visible par les rayons X du scanner d’un portique de la douane : un enfant noir de 8 ans qui dit, en français, comme une évidence, à l’ouverture de ladite valise rose : « Je m’appelle Abou ».
Tableau symptomatique de notre époque, « L’enfant à la valise » est l’histoire vraie rapportée par le quotidien El País et largement photographiée par La Guardia civil ne dit pas quelle est la marque de la valise ni si d’autres enfants sont déjà passés dans une malle au risque de s’asphyxier.
La valise rose est la version de poche des passe-frontières. On connaissait le camion frigorifique ou le conteneur comme ce 16 août 2014, en Angleterre, dans le port de Tilbury, dans l’embouchure de la Tamise, lorsque 35 migrants originaires du sous-contient indien dont sept mineurs ont été retrouvés dans un conteneur de bateau en provenance de Belgique. L’un d’entre eux était mort.
A Ceuta, la passeuse et le père ont été arrêtés et « mis à disposition de la justice ». Une juge d’instruction de Ceuta les accuse de « délit contre les droits des citoyens étrangers », avec la circonstance aggravante de mise en danger de la vie d’un mineur.
Abou a eu de la chance. Mais on ne peut s’empêcher de s’interroger sur son aventure placée sous le signe d’un destin migratoire à la fois exceptionnel et terriblement prévisible.