La résistance par la beauté ?

Paris, ce soir-là, se prépare à sa Nuit blanche. On pourrait les croire à l’écart du monde. Alors que 16,6 millions de Français regardent un match de rugby à la télé, ils sont une centaine réunis dans un cinéma, La Clef. Pas de film à l’affiche mais un  » texte d’intervention « , nous dit l’éditrice de Galaade, Emmanuelle Collas. Un livre de 26 pages mis en vente à 10 000 exemplaires. Un titre à la typographie géante, comme un appel à une mobilisation. Un manifeste pour dire  » non  » au ministère de l’immigration, de l’identité nationale, de l’intégration et du codéveloppement. Une version légèrement différente du texte publié par L’Humanité le 4 septembre.

 » Non  » à un  » mur-ministère « , selon le mot-valise des deux écrivains, Glissant et Chamoiseau, avec ce sous-titre :  » L’identité nationale hors-la-loi ? « , et cette dernière phrase, p. 26 :  » Tout le contraire de la beauté « . 

On attend Patrick Chamoiseau venu de Fort-de-France. Les militants de la commission culturelle du Comité d’entreprise de la Caisse d’Epargne Paris/Ile-de-France ont organisé la soirée. Certains lisent les quotidiens du jour. Libération fait son portrait de der sur le ministre du  » mur-ministère « , avec ce titre :  » Où il y a du gène…  » ; Le Monde publie un entretien avec un ancien ministre, Jacques Toubon, président de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration. 

Après une lecture du texte par trois comédiens, Marianne Basler, Nicole Dogué, Greg Germain, Chamoiseau confie avec douceur son  » indignation « . Oui… avec douceur.

Au nom de la beauté, les deux intellectuels de Martinique ont voulu rappeler ce qu’est l’identité, dire  » non  » à   » l’identité racine unique « ,  » oui  » à l’identité relation :

Extrait p. 11 :

 » Le côté mur de l’identité peut rassurer. Il peut alors servir à une politique raciste, xénophobe ou populiste jusqu’à consternation. Mais, indépendamment de tout vertueux principe, le mur identitaire ne sait plus rien au monde. Il ne protège plus, n’ouvre à rien sinon à l’involution des régressions, à l’asphyxie insidieuse de l’esprit, à la perte de soi. « 

A la tribune, l’auteur d’Ecrire en pays dominé explique qu’il faut dire  » non « . Même en levant seulement la main, même hors l’action collective. Pour Chamoiseau, l’époque est à l’individu et toute résistance individuelle est bonne à prendre.

De retour en Martinique, il sillonnera son île et ses communes pour appeler à résister  » au nom de la beauté « . 

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